L’étude des représentations médiatiques des personnes trans s’est développée depuis quelques années, notamment avec les travaux de Julia Serano1 et, en France, de Karine Espineira2. C’est ce sujet que j’aborde ici : le contenu et le rôle social joué par les représentations médiatiques des personnes trans, à partir d’exemples qui seront principalement cinématographiques et photographiques. Pour spécifier mon propos, ainsi que par souci de proximité, je vais surtout me concentrer sur le cas de la représentation des femmes trans, voire plus spécifiquement encore des femmes dites transsexuelles ou transsexuées, c’est-à-dire faisant ou ayant fait une transition sociale et/ou physique3.
Lorsque l’on aborde la question de représentations médiatiques, et plus spécialement encore celle de la représentation de groupes et individus qui sont socialement minorisés par des individus et des groupes dont les membres sont majoritaires vis-à-vis de ces minorisés (par exemple la représentation de personnes handicapées par des personnes valides, de personnes racisées par des blanc.he.s, et, pour ce qui nous intéresse ici, de femmes par des hommes et des femmes trans par des personnes cis), il convient de préciser d’emblée deux points afin d’éviter des contresens. Premièrement : il n’est pas question de juger de la qualité artistique des supports étudiés. Deuxièmement, surtout : la question des intentions explicites des artistes n’est pas pertinente pour comprendre la fonction, le message et les effets sociaux d’une œuvre. Un.e artiste (notamment si elle appartient à une majorité sociale) peut être parfaitement bien intentionné.e, bienveillant.e envers les femmes trans et toutefois produire une œuvre qui véhicule un message cissexiste et qui concourt au cissexisme social général voire le renforce.
Contre une approche individuelle qui se focaliserait sur les intentions des artistes, on peut donc partir du constat suivant : dans le cadre d’une société et d’un État qui sont cissexistes (c’est-à-dire qui considèrent et instituent que le véritable sexe d’une personne est une réalité biologique inaltérable, qu’un changement de sexe constitue une transgression morale, et que cette transgression doit être punie), il est absolument cohérent que les représentations des femmes trans produites par les médias majoritaires soient elles-mêmes cissexistes, et constituent une contribution idéologique et culturelle au cissexisme social systémique. On peut toutefois dépasser ce constat banal et aller jusqu’à suspecter que ces représentations cissexistes et transmisogynes (c’est-à-dire présentant des images doublement stigmatisantes des femmes trans en tant que femmes et en tant que trans) contaminent aussi les représentations censément bien-intentionnées qui sont produites par les médias communautaires LGBTI – si tant est qu’il y ait une pertinence sociologique à parler de communauté LGBTI : on peut en douter, puisque ces médias sont avant tout des médias gays. Une telle invocation d’une communauté LGBTI qui serait homogène, solidaire et ne contiendrait pas de dominations ni d’exclusions cissexistes, lesbophobes et intersexophobes relève plutôt d’un mythe auxquels croient seulement ceux qui en ont besoin pour asseoir leur légitimité politique (les hommes gays blancs, principalement), ou encore seulement les adversaires des luttes LGBTI percevant à tort en nous un lobby puissant et unitaire.
À partir de là, mon hypothèse est la suivante : les représentations médiatiques des femmes trans ne relèvent pas d’une question d’esthétique ni de visibilité, mais ont une fonction sociale contribuant à la minorisation des femmes trans, à savoir dissuader de transitionner ou stigmatiser celles qui le font, et cette fonction passe par la représentation du changement de sexe comme impossible, comme étant nécessairement voué à l’échec. Ce message est adressé à la fois aux femmes trans, contribuant ainsi à décourager les transitions (en plus des obstacles matériels qui y sont mis), et aux personnes cis, afin de leur signaler la prétendue fausseté des corps des personnes trans, et de disposer leurs conduites envers les femmes trans, soit sous la forme de violences, soit sous la forme d’un mépris qualifié de bienveillance.
Altériser
Je vais d’abord parler des méthodes d’altérisation (de présentation comme des êtres anormaux, bizarres et ridicules) des femmes trans dans les médias, des effets de ces présentations, en me focalisant sur trois procédés d’altérisation : la visibilisation, l’uniformisation et la fétichisation.
La visibilisation.
Le premier procédé, la visibilisation, consiste à visibiliser les personnes trans en tant que trans dans les médias. Il s’agit de former leur image de sorte que leur transitude apparaisse d’une manière manifeste aux sens du public, et les distingue des personnes cis de leur sexe d’arrivée. Ce faisant, il s’agit donc de dire que le changement de sexe n’est pas pleinement possible et qu’une personne trans sera toujours perceptible en tant que trans et donc selon son sexe d’assignation à la naissance, sans parvenir à « passer ». Or une bonne partie des personnes trans, ont justement pour but de pleinement être perceptibles, par elles-mêmes et par autrui, selon leur sexe d’arrivée : en tant que femmes pour les femmes trans et qu’hommes pour les hommes trans. En cherchant à visibiliser, à rendre perceptible un.e trans en tant que trans, la large majorité des représentations médiatiques des trans adressent à ces dernières et derniers un message décourageant : tu ne passeras jamais, tu auras toujours l’air d’un homme avec une perruque, ou d’une femme avec une moustache, ta transition physique est donc vouée à l’échec. Or cette crainte de ne pas passer, la crainte de ne pas pouvoir profondément changer son corps, bloque beaucoup de trans face à la transition physique. Il me semble que cette crainte est en réalité socialement produite par ce type de représentation visibilisante des personnes trans en tant que trans, représentation par laquelle montrer physiquement une personne trans c’est soit montrer la personne de manière à faire ressortir son sexe d’assignation à la naissance, soit montrer un entre-deux entre femme et homme. Une telle visibilisation soutient le message selon lequel une personne trans, premièrement, est toujours perceptible comme trans, et deuxièmement, doit être socialement reconnaissable, comme si elles devaient expliciter leur transitude à tout le monde.
Ce procédé de visibilisation fonctionne en premier lieu par la sélection d’acteurices cis pour jouer des personnages trans, et d’acteurices qui sont le plus souvent du sexe d’assignation à la naissance du personnage. Un tel casting ultra majoritaire de la part des réalisateurices était tout particulièrement marquant dans Laurence Anyways, puisque Xavier Dolan avait fait le choix, en recrutant Melvil Poupaud, non seulement de sélectionner un acteur masculin et cis mais qui plus est corporellement très masculin. Ce geste de visibilisation de la femme trans en tant que trans est rejoué dans le film lui-même puisque la première scène filme les regards interloqués et inquiets des gens dans la rue sur le personnage joué par Poupaud, en véhiculant ainsi le présupposé selon lequel une femme trans est toujours perçue comme trans dans l’espace public, ce qui lui vaut cette méfiance généralisée. Que ce soit ou non l’intention de Dolan, le message de son choix d’acteur et de son film est donc : une femme trans est un homme travesti qui sera toujours socialement perçue et traitée comme tel. Symétriquement, le choix d’actrices cis pour jouer des garçons ou des hommes trans se redouble de la tendance lourde à faire des scénarios sur des hommes trans tout jeunes, comme dans Tomboy de Céline Sciamma, avec Zoé Héran, ou encore About Ray, de Gaby Dellal et avec Elle Fanning. Ici, le choix de se focaliser sur de tout jeunes trans permet de faire de la masculinité le monopole des hommes cis : un homme trans ne pourrait être que petit, jeune et fluet, tandis que la vraie masculinité serait adulte et virile.
Toutefois, le casting d’acteurices cis étant du sexe d’arrivée du personnage trans qu’iels jouent n’abolit pas cette visibilisation. En effet, il s’agit alors de transformer l’acteurice afin de souligner que le personnage et, indirectement, toute personne trans, n’est pas réellement de son sexe d’arrivée mais constituerait un artifice. Une telle visibilisation avait été avouée avec une honnêteté symptomatique de la bonne conscience des cis prétendument bienveillants par l’équipe du film Lola Pater, et notamment son réalisateur, Nadir Moknèche, et son actrice principale, Fanny Ardant – qui jouait donc le personnage d’une femme trans, Lola. Ardant indique ainsi dans une interview au JDD avoir joué avec des prothèses lui augmentant ses seins et ses fesses4. Pourquoi ces prothèses ? Ardant l’explique dans une interview à Télérama qui est une longue suite de clichés cissexistes : « On a beaucoup travaillé sur l’apparence : Lola devait avoir beaucoup de poitrine, un rien trop de fesse, comme le rêvent ceux qui veulent devenir une femme. On a passé des heures sur la chevelure, aussi : le premier souci d’une transsexuelle est sa coiffure.5 » Cet usage de prothèses et sa raison explicite indiquent donc : 1) que les femmes trans sont comprises et montrées aux spectateurices par l’équipe du film comme des femmes fausses et artificielles, dont il s’agit de souligner perceptivement l’artifice en donnant aux personnages des fesses et seins d’une grosseur hors-norme ; 2) que le corps et l’appartenance de sexe d’une femme trans sont compris uniquement en termes d’ « apparence » superficielle, la réalité demeurant celle du sexe d’assignation à la naissance ; et 3) que les femmes trans sont comprises comme des êtres frivoles ne pensant qu’à leur coupe de cheveux. On a là un parfait exemple de transmisogynie, augmentant la misogynie classique, puisque la représentation des femmes trans est ici élaborée, d’une part, à partir de la misogynie faisant des femmes des créatures superficielles focalisées sur leur physique, et d’autre part à partir du cissexisme déniant la réalité du corps de la femme trans pour la rendre encore plus superficielle et fausse qu’une femme cis.
Ce procédé de visibilisation de la transitude des trans, soutenant l’impossibilité du changement de sexe, ne concerne pas, au cinéma, que l’écriture des personnages trans et le casting, mais également, dans la presse, la sélection de quelles personnes trans réelles sont montrées. Ainsi, dans les couvertures photographiques de l’Existrans, les photographes de Libération – Nolwenn Brod en 20186 et Marie Rouge en 20157 – se sont principalement focalisées sur les personnes en début de transition ne passant pas encore, les personnes non-binaires, les personnes ayant très probablement débuté une transition tardivement, ce qui rend le passing plus difficile, et des drags. Dans tous les cas, les trans qui sont photographiées sont celles et ceux qui sont, ou sont encore, visiblement trans. Le message est encore une fois la négation de la possibilité du changement de sexe : de ce qu’une personne trans puisse appartenir physiquement et socialement à son sexe d’arrivée et être perçue comme telle. La présentation publique des trans par la presse – et il s’agit de Libération, pas du Figaro – concourt ainsi à la présentation de la transition comme ne pouvant pas aboutir, concourant ainsi à nourrir la difficulté, pour les trans, de transitionner.
Le cinéma comme la presse véhiculent ainsi l’image de ce que Julia Serano nomme « la transsexuelle pathétique8 », pathétique car présentée comme essayant vainement et désespérément d’avoir l’air d’une femme.
L’uniformisation
L’exemple de Libération permet de préciser le deuxième procédé servant à altériser les femmes trans : l’uniformisation. En effet, en choisissant de montrer préférentiellement soit des trans ne passant pas encore, soit des personnes non-binaires et des drags, les photographes de Libération présentent l’ensemble des trans comme rejetant la fameuse binarité, ou cherchant à déconstruire les codes genrés sur elleux-mêmes. C’est ainsi l’androgynie qui est prise comme dénominateur commun des expériences et des corps trans – androgynie dans laquelle pourront certes se reconnaître les personnes non-binaires, mais non pas les personnes transsexuelles. En effet, en se focalisant sur la déconstruction des sexes, ces reportages peuvent ne pas présenter les femmes trans comme étant des femmes ni les hommes trans des hommes, effaçant ainsi la réalité des femmes et hommes transsexuelles. La focalisation sur les drags entretenant la confusion entre trans et drag et faisant de la transitude une simple performance théâtrale sans réalité corporelle profonde a été telle qu’elle a conduit à des stratégies d’explicitation. Ainsi, les Sœurs de la perpétuelle indulgence avaient été tellement mises au centre des couvertures photos de l’Existrans à laquelle elles participaient en tant qu’alliées que, depuis quelques années, elles défilent avec des pancartes précisant qu’elles ne sont pas trans afin de bien indiquer aux photographes et spectateurices de ces photos que leur apparence et leur performances drag ne sont pas représentatives de la transitude. Une nouvelle fois, le message contenu dans cette uniformisation de la transition par l’androgynie est dissuasif à l’égard des transitions : elles présentent en effet les personnes trans comme n’étant pas perceptibles dans leur sexe d’arrivée. Une telle image-type renforce ainsi la possible angoisse de personnes trans pré-transition craignant de ne jamais « passer ».
La fétichisation
Enfin, avec la visibilisation et l’uniformisation, le troisième procédé est la fétichisation, à savoir la focalisation sur les parties génitales des trans – surtout des femmes – et l’usage de la monstration de celles-ci comme révélatrice, voire comme trahissant la transitude de ces personnes. C’est ainsi que débute la série Hit and Miss : comment montrer que la personnage principale, jouée par l’actrice cis Chloë Sevigny et jusqu’alors non identifiable comme trans, est bien trans ? Réponse : rapidement dès le premier épisode, la montrer nue, sortant de la douche, avec un pénis – et ce d’une manière insistante. Le message est bien passé : elle est trans. Et le message adressé aux spectateurices cis est plus fondamental : une femme trans, c’est une femme à bite. La représentation est alors d’une part sexualisante (présentant les femmes trans comme des objets sexuels originaux destinées à combler les fantasmes secrets des cis), et d’autre part représente une partie de leur anatomie comme détentrice de la vérité profonde sur celles-ci, vérité qui ne sera même pas modifiée par une future vaginoplastie, qui ne serait qu’une modification artificielle et superficielle de cette vérité profonde. Cette focalisation fétichiste sur les femmes trans pré-op ou non-op comme objet sexuel extraordinaire explique la prévalence de ces dernières, plutôt que femmes trans opérées, dans la pornographie : avoir un pénis est censé être ce qui fait la réalité profonde et l’intérêt sexuel des femmes trans. Encore une fois, le message peut à la fois être reçu par les cis comme par les trans. Pour les cis, il présente les trans comme des objets sexuels hors-normes. Pour les trans, elles sont renvoyées à leur sexe d’assignation et au pénis comme recelant la vérité profonde et (mal) cachée sur elles-mêmes.
Visibilisation, uniformisation et fétichisation : dans les trois cas, ces procédés présentent les femmes trans comme toujours perceptibles en tant que trans et ne parvenant donc pas à atteindre leur sexe d’arrivée. Ces procédés construisent ainsi l’image socioculturelle globale d’une impossibilité physique du changement de sexe. Cette image a pour effet, d’une part, de décourager les transitions physiques et, d’autre part, de disposer les cis à traiter les trans soit selon leur sexe d’assignation à la naissance, soit comme des êtres anormaux à part des classes de sexe existantes9, et à considérer que les personnes trans leur doivent de faire connaître leur transitude ou seraient de toute manière dans l’impossibilité de ne pas le faire.
Punir
Or, les représentations médiatiques majoritaires des personnes trans ne fonctionnent pas seulement par une altérisation cherchant à manifester, à rendre publique leur transitude, mais aussi par la punition. Il s’agit alors de montrer la punition sociale – notamment les violences – infligées aux femmes trans du fait de leur transitude (puisque celle-ci a d’abord été visibilisée). Cette surreprésentation des punitions infligées aux femmes trans pour leur transgression de l’ordre genré et de sa naturalité prétendue confine à une forme de sadisme à l’endroit des personnages de femmes trans dans les œuvres de fiction leur étant consacrées, y compris celles qui sont inspirées de faits réels qui sont sélectionnés de manière à présenter les femmes trans comme ne pouvant pas être autre chose que des victimes. Tout fonctionne comme si la transgression qui est constituée par le personnage de femmes trans devait être punie, et l’ordre du genre rétabli, pour qu’à la fin de l’œuvre tout soit bien qui finisse bien. Encore une fois, les effets de ces représentations concernent à la fois les femmes trans et les cis. Vis-à-vis des femmes trans, ces représentations associant systématiquement la transitude à une punition sociale passant notamment par des agressions, doit leur montrer que la transition s’accompagnerait nécessairement de maltraitances. Elles ont donc un effet dissuasif sur la transition. Vis-à-vis des cis, ces représentations de violences – même si celles-ci sont dénoncées – légitiment ces violences en les présentant comme le traitement normal des femmes trans, indissociables de leurs conditions – voire font de ces violences un trait comique et les justifient alors plus encore. On peut aller jusqu’à faire l’hypothèse que la représentation fictionnelle des femmes trans fonctionne comme un extrême de la représentation des femmes en général : les femmes sont toutes soumises aux violences patriarcales, et le fait de représenter des femmes trans permet de libérer et d’expliciter encore plus, et d’une manière encore plus sadique, les violences envers les femmes. Les femmes trans constitueraient ainsi à la fois des êtres dont on dénie la féminité mais dont on la reconnaît aussi sous la forme d’une punition, en les soumettant aux mêmes violences que les autres femmes (cis), mais sous des formes encore plus extrêmes.
Quelques exemples pour concrétiser ce propos général.
Pour le cas français, tout comme beaucoup d’entre nous ont grandi avec pour seule représentation filmique du lesbianisme le film Gazon maudit, sorti en 1995 (heureusement qu’après il y a eu The L-Word !), beaucoup d’entre nous ont grandi avec pour principale représentation filmique d’une femme trans (ou travestie ? cette distinction est sans-doute inexistante pour la plupart des cis) la personnage de Katia jouée par Christian Clavier dans Le père Noël est une ordure (sorti en 1982). Ce qui retient l’attention ici c’est que la personnage de Katia est non seulement présentée comme ridicule et comme un homme avec une perruque, mais est aussi une souffre-douleur (elle se fait railler, frapper, tirer dessus…) et que les violences qui lui sont infligées sont des passages censés faire rire. La transgression sexuée représentée par son personnage reçoit ainsi sa punition sous une forme comique à l’écran.
Cependant, des films mieux intentionnés, se présentant comme plus sociologiques et non pas comiques, partagent cette médiatisation des filles et femmes trans par la mise en scène de leur punition. C’est le cas du film Girl de Lukas Dhont (sorti en 2018). À l’inverse de toute approche empowerante, ce film se présente comme un parcours de la combattante pour Lara. Humiliée par ses prétendues amies, faisant face à des refus de traitement de la part du corps médical, l’héroïne finit ainsi par s’auto-émasculer. Comme l’indique cette fin, ce film partage de plus la fixation fétichiste sur les parties génitales du personnage de Lara, évidemment jouée par un garçon cis. Ici, malgré la prétendue bienveillance du réalisateur, le film remplit bien une fonction socioculturelle cissexiste de découragement de la transition. Certes, il s’agit de dénoncer les violences et les refus médicaux conduisant à la scène finale, mais il n’en demeure pas moins que le message du film est le suivant : si vous transitionnez, vous devrez vous mutiler. Et la vive polémique qui a entouré la sortie de ce film dans les milieux trans10 ne laisse pas de doute sur le fait que c’est bien ainsi qu’une bonne partie des femmes trans ont reçu le message de ce film, aussi bien intentionné soit-il (mais, encore une fois, l’intention ne suffit pas à déterminer le contenu du message qu’une œuvre fait passer).
Enfin, un exemple plus marquant encore est celui de The Danish Girl, de Tom Hooper, sorti en 2016, présenté comme le biopic de Lili Elbe (en réalité Lili Elveness), l’une des premières femmes trans a avoir eu accès à une vaginoplastie, en 1930. Je passe sur le fait que le film choisisse encore de se focaliser sur les violences subies par Lili (torture par le corps médical, agression, etc.) Il est plus intéressant de poser la question suivante : pourquoi l’historiographie, les médias, et en l’occurrence ce film, ont-ils retenu Lili Elveness plutôt que Dora Richter voire Carla van Crist comme « patiente zéro », première femme trans ayant subi une SRS de l’histoire, alors que ces deux dernières ont été opérées antérieurement ? On pourrait répondre que l’entourage artiste et journalistique de Lili Elveness a permis la médiatisation rapide de son histoire, ce qui n’est pas le cas pour Richter et Van Crist. Mais on peut faire l’hypothèse d’une raison moins contextuelle : on se souvient de Lili Elveness précisément parce qu’elle est morte de ses opérations. Et c’est aussi pour cela que le film s’attarde lourdement sur les cris de douleur de Lili après ses opérations et sur sa mort après une tentative de greffe d’utérus. L’histoire de Lili plaît aux cis parce qu’elle contient comme une punition intégrée de la transition : celle-ci la conduit à la mort du fait des chirurgies expérimentales de Kurt Warnekros. Cette mort intervient comme un châtiment de la transgression qu’est la transition. La bienveillance de Hooper inclut donc ici un apitoiement méprisant, et le message, une nouvelle fois, de l’impossibilité prétendue du changement de sexe, puisque la tentative de Lili la conduit à la douleur puis à la mort.
Puisque la représentation filmique des femmes trans inclut presque systématiquement la présentation de la punition de celles-ci, par des persécutions, des violences, voire la mort, il est logique que la transition MtF elle-même en vienne à pouvoir être représentée comme une punition. C’est le cas dans les films La Piel que Habito d’Almodovar, sorti en 2011, et Revenger de Walter Hill, sorti en 2017. Dans les deux cas, l’histoire raconte une réassignation MtF contrainte faite par un.e savant.e fou/folle et sadique, et présente le changement de sexe MtF comme la pire punition qui puisse être infligée à un homme. Cette représentation est évidemment sous-tendue par une fétichisation misogyne de la féminité comprise comme objet de violences, condition que, dans ces scénarios, des hommes cis veulent essayer d’endosser pour l’occasion. Ainsi, la transition MtF elle-même est perçue et construite par ces films comme une mutilation incompréhensible ne pouvant résulter que d’une violence ou d’une folie.
Il est à ce titre symptomatique que cette association de la transition MtF à la folie soit partagée par les représentations médiatiques des femmes trans se prétendant bienveillantes comme par les représentations ouvertement hostiles. Présenter la transitude comme une maladie mentale est ainsi un trait systématique des représentations cinématographiques de femmes trans comme de dangereuses psychopathes. Il en va ainsi du personnage de Bobbi dans Pulsions de Brian de Palma (à la fois femme trans et psychiatre s’auto-refusant sa vaginoplastie !) ou encore celui de Buffalo Bill dans Le silence des agneaux, qui, en s’habillant avec la peau des femmes qu’il tue, semble donner vie aux élucubrations de Janice Raymond pour qui les femmes trans cherchent en transitionnant à s’approprier le corps des femmes cis11. Représenter les femmes trans comme des psychopathes est d’ailleurs pareillement pratiqué dans le cadre de productions prétendument bienveillantes, à l’instar de la série Pretty Little Liars. Répondant aux critiques de son twist final faisant révélant que la grande méchante « A » n’était autre que CeCe, une femme dont on apprend alors la transitude, la productrice Marlene King soutient que sa série apporte « plus de conscience » sur le sujet trans et « humanise » le personnage trans (puisque les femmes trans ont semble-t-il besoin d’être humanisées), ajoutant que faire d’elle une psychopathe serait une manière de dénoncer les mauvais traitements sociaux et familiaux subis par les personnes trans : « si vous traitez quelqu’un comme s’il n’était rien, il y a des chances qu’il traite tout autant les autres comme s’ils n’étaient rien.12 » On appréciera l’argument consistant à conseiller de ne pas maltraiter les personnes trans au motif que celles-ci risqueraient alors de se venger et de devenir des psychopathes. Dans tous les cas, en corrélant folie dangereuse, qu’elle se tourne contre soi ou contre autrui, et transition, ces représentations des femmes trans, bienveillantes comme hostiles, partagent de fait un discours similaire et qui a la même efficace sociale : dissuader la transition auprès des femmes trans et stigmatiser ces dernières auprès des personnes cis.
Enfin, lorsque les médias ne représentent pas la transition comme appelant une punition ou comme étant elle-même une punition, ils procèdent eux-mêmes à cette punition. C’est le cas avec les couvertures photographiques des manifestations trans par les médias mainstream comme Libération. En effet, malgré les appels répétés des militant.e.s trans à flouter les visages sur les photos publiques, ces médias se refusent toujours à le faire, courant ainsi le risque d’outer des personnes trans au placard auprès de leur famille, de leurs proches et de leurs employeurs. Cette pratique de l’outing présuppose encore une fois qu’une personne trans doit être socialement reconnaissable, doit rendre publique sa transitude, et c’est ici la presse même qui se charge de faire connaître son visage. Sous couvert de célébration des corps et identités trans, ce type de reportage photo constitue en lui-même une punition (un outing) et une punition qui en appelle d’autres puisque la divulgation de la transitude d’une personne l’expose à d’autres violences et exclusions de la part de son entourage si elle était jusqu’alors au placard.
Dans les médias « communautaires » et militants
Il est pour finir important de souligner que ces procédés d’altérisation et de punition ayant pour fonction socioculturelle de décourager les transitions et de normaliser les violences cissexistes n’appartiennent pas qu’aux médias mainstream mais déterminent aussi toute une partie de la représentation des femmes trans dans les médias dits communautaires et/ou militants LGBTI – et ce non seulement dans la partie majoritaire d’entre eux c’est-à-dire LGB voire surtout gay, mais aussi de la part de certain.e.s artistes trans elleux-mêmes, probablement car nos travaux se vendent mieux lorsqu’ils répondent à la pression des attendus cissexistes et fétichistes des cis envers nous. Dans ces médias communautaires et militants, ces représentation cissexistes, d’une part, reproduisent les procédés des médias mainstream et, d’autre part, prennent des formes spécifiques.
Il convient d’abord de rappeler que le non-floutage des photos et vidéos de l’Existrans n’est pas le monopole de Libération. Les sites communautaires Frictions (en 2017 avec le reportage photo de Gaëlle Matata13) et Komitid (en 2018 avec les reportages photo et vidéo de Xavier Héraud14 et Maëlle Le Corre15) partagent cette pratique. Dans le second cas, le tollé suscité auprès de personnes trans, qui se sont exprimées notamment sur Twitter16 et par un communiqué de l’association Trans Posé.e.s17, a conduit à la suppression des photos sur le site de Komitid18.
Outre l’outing, certaines autres pratiques cissexistes sont partagées par les médias hétéros et communautaires, mais aussi par les textes de groupes militants communautaires se proclamant généralement queer. Ces groupes partagent en effet la focalisation fétichiste sur les organes génitaux (de préférence pré-op ou non-op) des personnes trans. Cette focalisation est ainsi commune à la pornographie (les catégories « chick with dick » ou « shemale »), aux émissions grand public sur les trans se concentrant lourdement sur les SRS (cf. par exemple Le sexe de mon identité en 2012 ou encore Être fille ou garçon, le dilemme des transgenres, en 2017), aux théories des TERF, et aux discours militants prétendument radicaux qui, en estimant subversif de présenter les trans comme des « femmes à bite » ou des « mecs à vagin »19, relaient aussi ce fétichisme. Une telle focalisation ne fait que répondre aux attendus fétichistes des cis à notre encontre et à l’image des femmes trans comme fausses.
Ce point permet de repérer une spécificité de la représentation des trans, et tout particulièrement des femmes trans, dans les médias communautaires et/ou militants : les trans y sont jugés représentables et acceptables uniquement si iels apparaissent à l’avant-garde de la déconstruction des stéréotypes de genre. Il est ainsi exigé que la visibilisation de la transitude qui pratiquée par les médias soit aussi pratiquée par les trans sur elleux-mêmes pour que leur transitude soit valable, politiquement pertinente et donc montrable médiatiquement. Il va de soi qu’une telle approche subjectiviste du genre ne pose pas la question de la sécurité relative offerte par le passing (relative puisque la femme trans qui passe n’est plus agressée en tant que trans mais l’est encore en tant que femme) : une femme trans prétendument « binaire » se verra accusée d’un conformisme qui reproduirait et renforcerait les stéréotypes de genre (un discours que l’on rencontre aussi chez les TERF comme Janice Raymond20 ou encore Sheila Jeffreys21) et est donc soumise à une double contrainte : la contrainte sociale de ne pas être trop trans, et la contrainte communautaire de ne pas être trop femme.
Une telle monstration préférentielle des personnes trans déconstruisant le genre – selon un geste « subversiviste22 », pour reprendre un concept de Serano, qui hiérarchise les expériences trans – est patent dans la banque d’image se voulant militante The Gender Spectrum Collection, sur le site Broadly, constituée principalement de photographies de la photographe trans Zackary Drucker23. Ce projet se veut le plus inclusif possible en offrant « une bibliothèque de photos fournissant des images de mannequins trans et non-binaires qui vont au-delà des clichés [a stock photo library featuring images of trans and non-binary models that go beyond the clichés]24 ». Cette inclusion sur un large « spectre du genre » est toutefois sélective, puisqu’y sont visibilisées des personnes trans et non-binaires qui, soit par non-binarité soit du fait du moment de leur transition, ne passent pas, ou pas encore, et illustrent donc physiquement un entre-deux des deux sexes sociaux. On n’y trouvera pas ou presque pas de femme trans qui passe et qui pourrait tout autant illustrer une banque d’image « femmes » que « trans ». L’inclusivité visée laisse donc encore des exclues, à savoir la majorité des femmes trans qui ne souhaitent pas être perçues comme trans et qui, pour beaucoup, y parviennent. Cette inclusivité procède à la même uniformisation androgyne des expériences et corps trans que celle pratiquée par les médias mainstream, sous un prétexte qui est cette fois militant. Ce faisant, une telle sélection et représentation préférentielle, en choisissant de corréler la représentation de personnes trans et non-binaires à des personnes n’apparaissant physiquement pas comme de leur sexe d’arrivée – voire ne cherchant pas de sexe d’arrivée (ce qui est bien évidemment légitime mais ne constitue pas la totalité des parcours trans) – rejoint la représentation cissexiste, aussi reprise à leur compte par les TERF25, de la prétendue impossibilité physique du changement de sexe. Est donc reprise la représentation négative décourageant les transitions physiques, mais cette fois pour célébrer un entre-deux qui, bien qu’il concerne certaines personnes, y compris parmi les trans, ne subsume pas pour autant la totalité des expériences trans et exclut les parcours transsexuels de ce qui est politiquement valable et médiatiquement montrable.
Conclusion : visibilité ?
Pour conclure, je tiens à revenir sur le fait que la visibilité et la représentation soient devenues des mots d’ordres dans de larges franges des mouvements LGBTI, y compris dans leurs composantes trans (en témoigne notamment la « journée de visibilité trans » ou TDoV). De tels mots d’ordres doivent être maniés avec précaution et ne pas constituer le tout de nos mouvements. En effet, comme je l’ai indiqué, la visibilisation peut aussi être une technique cissexiste utilisée contre les femmes trans, niant leur appartenance à la classe des femmes, les ridiculisant et les outant26. De ce fait, il est essentiel, premièrement, de ne pas faire de la visibilité une fin en soi, et, deuxièmement, d’accorder une importance particulière au contenu des représentations des femmes trans, et non seulement à l’existence de ces représentations ou au fait que leurs producteurices soient elleux-mêmes trans – car la transitude n’est pas une lucidité magique qui pourrait nous épargner toute réflexion sur les contenus que nous pouvons donner à nos représentations de la transitude. N’oublions pas que la visibilité, quand bien même elle se fait à nos conditions, ne suffit pas à elle seule à contrecarrer les messages cissexistes diffusés sur nous par les médias. Certes, dans le but d’appréhender la possibilité de transitionner d’une manière apaisée, il est préférable d’avoir accès à d’autres représentations de personnes trans et de la transition que celles qui sont véhiculées dans des films comme Le père Noël est une ordure, Girl ou The Danish Girl. Il n’en demeure pas moins que des représentations intégrant des personnes trans et plus militantes, comme les films Tangerine, Une femme fantastique, ou encore les séries Pose et Euphoria, ne suffisent pas à faire tout le travail de compensation du découragement à la transition qui est fait par les représentations médiatiques majoritaires des femmes trans. Pour ce travail de compensation, une personne cherchant à transitionner va la plupart du temps chercher sur les forums, les réseaux sociaux et dans les associations trans. Une « bonne » visibilité peut donc être utile, mais reste insuffisante. Et nous ne devons pas oublier que, dans une société systémiquement cissexiste, les principaux appareils médiatiques appartiennent logiquement aux cis et diffusent le cissexisme, quelle que soient les bonnes intentions de leurs propriétaires. C’est donc seulement à la marge et, encore une fois, sans en faire une fin en soi, que nous pouvons jouer sur la visibilité.
- Julia Serano, Whipping Girl. A Transsexual Woman on Sexism and the Scapegoating of Femininity, Berkeley, Seal Press, 2007, p. 35-52. Traduction française partielle par Noémie Grunenwald : Manifeste d’une femme trans et autres textes, Lyon, Tahin party, 2014. ↩
- Karine Espineira, La transidentité: De l’espace médiatique à l’espace public, Paris, L’Harmattan, 2008 ; Médiacultures. La transidentité en télévision, Paris, L’Harmattan, 2015. ↩
- J’emploie ici le terme « transsexuel.le » pour désigner les personnes qui passent d’une classe sociale de sexe à une autre (d’homme à femme ou inversement). L’usage courant de ce terme se focalise sur les personnes qui opèrent par ce changement en effectuant une transition physique. En réalité, toutes les personnes changeant de classe de sexe n’ont pas recours à une transition physique, même si ces cas ne sont pas les plus nombreux, et que l’extension de ces deux usages du terme « transexuel.le » se recouvre donc en grande partie (mais pas totalement). ↩
- https://www.lejdd.fr/Culture/Cinema/fanny-ardant-en-genre-libre-dans-lola-pater-3405104 ↩
- https://www.telerama.fr/cinema/fanny-ardant-est-ce-que-le-sexe-vous-definit-absolument-pas,161009.php ↩
- https://www.liberation.fr/photographie/2018/10/15/22e-existrans-trans-et-intersexes-mobilises-a-paris_1685252 ↩
- https://www.liberation.fr/france/2015/10/18/la-vie-en-trans_1406639 ↩
- Julia Serano, Whipping Girl, op. cit., p. 36. ↩
- Chez les femmes trans, ce déclassement hors de la masculinité a cependant pour conséquence que, perçues comme trans, elles sont traitées comme des femmes selon le pire du traitement qui est déjà réservé à celles-ci (violences sexuelles, exploitation, etc.) La transmisogynie consiste ainsi à la fois à refuser aux femmes trans de les considérer comme des femmes mais à les (mal)traiter comme telles par la violence. ↩
- Cf. par exemple l’article de Karine Espineira : https://www.genre-ecran.net/?Girl ↩
- Janice Raymond, The Transsexual Empire : The Making of the She-Male, New York et Londres, Teachers College Press, 1994 (première édition en 1979), p. 99, 104 ; traduction française par Jeanne Wiener-Renucci : L’empire transsexuel, Paris, Seuil, 1981. ↩
- https://www.buzzfeed.com/jarettwieselman/pretty-little-liars-boss-defends-controversial-transgender-r ↩
- https://friction-magazine.fr/reportage-photos-existrans-paris-2017/ ↩
- https://www.komitid.fr/2018/10/14/reportage-lexistrans-2018-en-photos/ ↩
- https://www.youtube.com/watch?v=uyhflmcL220 ↩
- https://twitter.com/komitid_fr/status/1051451820361601025 ↩
- https://transposées.eu/communiques:komitid-existrans2018 ↩
- https://twitter.com/komitid_fr/status/1052142576273375232 ↩
- Cf. la liste des « gentils » dans cet appel à un cortège de tête radical lors de la marche des fiertés lyonnaise de 2019 : « Nous, trans, pédé, bi, gouines, non-binaires, tafiole, goudou, travelo, pédales, genderqueer, mecs à vagin, Meufs à bites, intersexes ». https://rebellyon.info/Nos-mortEs-sont-politiques-20818. Cf. aussi la traduction fautive de la brochure Crazy Trans Woman par « le syndrome de la folle à bite » sur le site https://transgrrrls.wordpress.com/, traduction qui a été ensuite supprimée. ↩
- Janice Raymond, The Transsexual Empire, op. cit., p. 100 et 119 par exemple. ↩
- Sheila Jeffreys, Gender Hurts. A Feminist Analysis of the Politics of Transgenderism, New York, Routledge, 2014. Chez Jeffreys, l’accusation de reproduction des stéréotypes de genre associe justement la transsexualité à une analyse queer en termes d’identités de genre individuelles (la transsexualité existerait donc seulement depuis le développement des études queer aux États-Unis dans les années 1990 ?) Ainsi, elle fait aux femmes trans le même reproche que leur font… les subversivistes auxquels elle les identifie ! ↩
- Julia Serano, Whipping Girl, op. cit., p. 346-349. ↩
- https://broadlygenderphotos.vice.com/ Zackary Drucker s’est par ailleurs illustrée en étant conseillère de Jeffrey Tambor pour son rôle de femme trans dans la série Transparent. Elle se félicite de ce rôle dans le documentaire d’Arte Absolument trans, focalisé sur la visibilité médiatique et faisant abstraction des conditions de vie des trans. Rappelons qu’en 2018, Tambor a été accusé de harcèlement sexuel par deux actrices trans jouant dans cette même série, Trace Lysette et Van Barnes. ↩
- https://broadlygenderphotos.vice.com/guidelines ↩
- La réfutation – contrefactuelle – de la possibilité physique et sociale du changement de sexe est ainsi la thèse fondamentale de Janice Raymond dans The Transsexual Empire, op. cit., par exemple aux p. 3-4. Elle s’appuie pour ce faire sur des arguments cissexistes somme toute banals telle qu’une connaissance approximative de la biologie accordant aux chromosomes une détermination intégrale de la sexuation, pour en tirer toutefois des conséquences plus originales comme la thèse selon laquelle la transition MtF serait un viol (de qui ?) qui transformerait la totalité du corps des femmes trans en phallus géant (cf. p. 105 et 112). ↩
- Sur ce sujet, cf. la présentation des positions de Julia Serano par Noémie Grunenwald dans Simonae: https://simonae.fr/militantisme/lgbt/visibilite-femmes-trans-pop-culture-privilege/ ↩
Article édifiant ! Merci beaucoup pour votre travail !